30 novembre 2015

La Carretera Australe en sac à dos, 7 jours sur la route

Ci-dessous le récit de notre expédition le long de la Carretera Austral. Cette route mythique qui a, sous l'air Pinochet, désenclavé la Patagonie chilienne. Faute de temps, nous ne l'avons emprunté que de Chaitén à Chile Chico, c'est-à-dire seulement sur sa portion centrale. C'est qu'il faut avoir du temps pour l'arpenter, et surtout quand on est en mode sac à dos sans son propre moyen de locomotion. Les bus y sont rares ainsi que les voitures. La Patagonie n'est clairement pas la zone la plus peuplée du Chili ! Etant donné la rareté des bus et la gentillesse des chiliens, de nombreux voyageurs la parcourent en auto-stop (très fréquent au Chili). Moi j'avoue qu'à la base cette idée ne m'enchantait guère.... car trop d'incertitude. Et d'autant plus qu'on avait une deadline, une de nos amies (Jessica) venant nous rejoindre pendant 15 jours. On avait seulement 9 jours pour parcourir autour de 1 500 km et la retrouver à El Calafate en Argentine. Mais bon, comme diraient certains, c'est ça aussi l'aventure !!!


Jeudi 12 Novembre - Quellón (Chiloé) => Chaitén

Après une petite nuit et 5h de ferry depuis Quellón (île de Chiloé), nous voici débarqués à Chaitén, le long de la Carretera Austral. 

Chaitén est une petite ville un peu fantôme, qui est en train de renaître de ses cendres. Suite à l'éruption du volcan Chaitén en 2008 (qui est à une trentaine de kilomètres de là), elle aurait pu être rayée de la carte. C'est d'ailleurs ce que le gouvernement chilien voulait en rachetant les maisons dévastées. Mais c'était sans compter sur la ténacité d'une partie des habitants, pour qui il était hors de question de déménager. Une partie seulement des maisons a donc été reconstruite. Les autres sont encore remplies de cendre.


Chaitén est une ville étape parfaite pour les amoureux de la nature, car située non loin du parc Pumalin. C'est un des rares parcs gratuits au Chili. Il a été fondé par le créateur de la marque de sport "The North Face". Son but affiché, la préservation de l'écosystème.

Faute de temps, nous n'avons randonné qu'une journée dans ce parc ; faute d'une météo favorable aussi. Nous sommes allés au sommet du volcan Chaitén pour admirer la vue et son cratère. Nous n'avons vu que le cratère et sommes rentrés littéralement trempés de la tête au pied. Le charme de la Patagonie tient à la pluie, pour le meilleur et pour le pire ! En cas tout, entre la pluie et les arbres morts qui jonchaient le sentier jusqu'au cratère, l'ambiance était plutôt glauque et glaciale.



NB : Pour aller au début du sentier qui monte jusqu'au cratère du volcan Chaitén, nous avons pris le bus en direction de Puerto Montt à l'aller (1 000 pesos par pers., soit 1,2€) et fait du stop au retour. 

Vendredi 13 Novembre - Chaitén => La Junta (170 km)

Au petit matin, emmitouflés sous notre épaisse couette douillette, nous entendons la pluie qui martèle la vitre. Depuis hier après-midi, elle ne semble pas vouloir s'arrêter. On ne regrette vraiment pas d'avoir dormi à l'hôtel et non sous tente comme prévu initialement. On pressent par contre que la journée risque d'être encore bien humide. Vu le temps, on a vite écarté l'option auto-stop et on s'est rabattu sur un bus, qui par chance partait en fin de journée vers le sud. En attendant on est resté collés au poêle à bois de notre auberge et on s'est offert un bon déjeuner au resto de l'hôtel (El Quijote). Au menu du poisson ultra frais en format XXL ! Pour 6 000 pesos par pers. (soit 8€), on en a clairement eu pour notre argent.


A 17h, nous sommes partis en direction de la Junta (3h de route). Nous voulions initialement aller jusqu'à Puyuhuapi (à 50 km plus au sud), mais c'est déjà ça. Pour l'instant, côté paysage, entre la pluie et la brume, on n'a pas vu grand chose. Espérons que le vent tourne.

Samedi 14 Novembre - La Junta => Puyuhuapi (50 km)

5h du matin, nous sommes déjà à nouveau en route. La veille, nous avons appris par le chauffeur de bus, qu'il y avait un bus le lendemain pour Puyuhuapi. Vu que la météo était toujours aussi capricieuse, il n'était pas question de le louper et de se retrouver sur le bas-côté à faire du stop.

A 6h, nous voici par contre débarqués du bus. Vu l'état de la route (cabossée et caillouteuse), on avait espéré qu'il mettrait un peu plus de temps. Le jour commence à se lever mais tout est désert. Seule la fumée qui s'échappe des maisonnettes nous assure que ce village est bien habité (en Patagonie, on se chauffe au poêle à bois). Afin de ne pas réveiller tout le village, on attend dehors une heure décente pour faire la tournée des hôtels. La vie de backpacker n'a pas que des bons côtés ! Mais malgré le froid qui nous picote les joues, on se dit qu'on est drôlement bien là où on est. On a appris la veille au soir avec stupeur, à la télé chilienne, les attentats qui venaient d'avoir lieu à Paris, dans des endroits qu'on a fréquenté et que nos amis fréquentent... Cette annonce nous a fait bien plus froid dans le dos que le petit vent de Patagonie.

Une fois nos sacs posés à l'intérieur d'une auberge - car à nouveau on a écarté illico l'option camping - nous voici partis en direction du parc Queulat, qui est à une petite trentaine de kilomètres de là. Cette fois-ci, nous n'avons pas d'autre choix que de faire du stop. Par chance, il ne pleut pas. Et par chance, en peu de temps et au moyen de deux chauffeurs, nous atteignons notre destination. L´intérêt de ce parc, est le glacier qu'il renferme. Après 1h30 de marche en forêt à se demander comment il est possible de finir par tomber sur un glacier, nous atteignons le mirador. Et là, c'est la déception... Une mare de nuages nous barre la vue.... On ne voit que quelques névés nous prouvant que derrière cette masse brumeuse il y a bien un glacier magique à voir. Décidément, la Patagonie se montre timide à nous dévoiler ses charmes.


Dimanche 15 Novembre - Puyuhuapi => Coyhaique (250 km)

N´ayant pas le temps d'attendre que le temps change, nous reprenons notre route direction Coyhaique. A nouveau par chance, nous pouvons prendre un bus depuis Puyuhuapi. Par chance car le temps étant toujours à la pluie, on n'est toujours pas motivés pour faire du stop. Si les chiliens s'arrêtent facilement, le problème c'est le manque de trafic. Il n'y a qu'une route qui va vers le sud mais aussi peu de gens qui l'emprunte. Et l'idée de devoir attendre 2h sous la pluie avant d'apercevoir une voiture ne nous fait guère rêver.

En début d'après-midi nous arrivons à destination. Coyhaique est la plus grande ville de la région (50 000 habitants) et on y trouve donc supermarchés et distributeurs de billet. Une fois ravitaillés, nous allons chez Andrea et Lalo, chez qui nous allons passer la nuit. Nous ne les connaissons pas, mais ce sont des amis des couchsurfeurs qui nous avaient accueillis à Ancud, sur l'île de Chiloé. Ils ont notre âge et, comme nous, ont fait un petit tour du mode. On sympathise immédiatement. Ils habitent une petite cabane en bois entre la forêt et la rivière. On regrette alors de manquer de temps pour ne pas passer une deuxième nuit chez eux. Ils connaissent hyper bien la région et auraient pu nous indiquer pleins de chemins de randonnées sympas. C'est un des autres avantages de connaître des locaux.

Nous avons en tout cas passé une superbe soirée en leur compagnie et profiter de quelques rayons de soleil en fin d'après-midi. Les premiers depuis qu'on descend la Carretera Austral.


Lundi 16 Novembre - Coyhaique => Puerto Tranquilo (220 km)

Si la Patagonie est sauvage, elle est aussi d'humeur changeante et parfois très bougon. Après une brève éclaircie, c'est sous un ciel grisâtre qu'on atteint Puerto Tranquilo, à nouveau en bus depuis Coyhaique.

Par chance, nous avons trouvé un hôtel juste avant que la pluie ne reparte. Ayant rencontré deux autres voyageurs dans le bus, le proprio de notre hôtel nous propose de partager une cabane à quatre, i.e. un petit appartement. Et vu qu'il a plu toute l'après-midi sans interruption, on a bien profité de notre salon privé.... A nouveau on a sorti les livres et on s'est collé près du poêle. Notre activité phare depuis quelques jours... On commence à trouver cette descente un peu monotone et bien loin de ce qu'on s'était imaginé.


Mardi 17 Novembre - Puerto Tranquillo => Puerto Guadal (60 km)

A nouveau, c'est la pluie martelant les carreaux qui nous réveille. On s’était arrêté à Puerto Tranquilo pour aller visiter des grottes de marbre accessible en bateau. La perspective d'être une heure sous la pluie sur un bateau ne nous enchante guère. Toute la matinée, on a espéré une éclaircie qui n'est pas venu... On est donc reparti de Puerto Tranquilo en bus et un peu dépité.... 

Mercredi 18 Novembre - Puerto Guadal => Chile Chico (100 km)

Nous avons dormi à Puerto Guadal. Il ne nous reste plus que 100 km à parcourir pour quitter enfin la Patagonie chilienne qui nous a refusé ses richesses. Et j'avoue que j'ai hâte. Comme pour nous narguer, c'est sous un grand soleil que le jour se lève. Au moins, on pourra profiter du paysage cette fois-ci. Il y avait un bus qui partait tôt le matin de Puerto Guadal en direction de Chile Chico, notre derrière étape au Chili. Mais cette fois-ci on a eu envie de s'essayer au stop.

 

A 9h30 nous voici donc postés à la sortie de la ville avec nos grands sourires. Et là, première déception, il y a déjà deux autres voyageurs en train d'attendre un chauffeur depuis 7h30. Génial... Déjà qu'il n'y a pas beaucoup de voiture, on va en plus devoir d'abord attendre qu'ils soient pris. Je n'aurais jamais pensé qu'il y aurait d'autres auto-stoppeurs dans un tel bled paumé.

Je sors mon livre, m'installe sous un abri de bus et commence à craindre que cette journée soit longue....

11h, les deux autres auto-stoppeurs viennent de partir. On va enfin pouvoir lever notre pousse. Enfin quand on verra une voiture...

12h. Aucune des rares voitures qui sont passées devant nous ne s'est arrêtée. Il n'y a que des gens allant dans les fermes d'à côté qui semblent emprunter cette route....

13h. Mon ventre commence à gargouiller de faim et d'ennui. Trop confiants on a eu la bêtise de ne pas se prévoir de pique-nique. Quand je pense qu'on pensait déjeuner à Chile Chico ! Alors qu'on est toujours sur le même bas-côté. Et même si le supermarché n'est pas loin, y aller signifie quitter notre poste pendant un quart d'heure et risquer de louper LA voiture. De frustration, j'engloutie un paquet de gâteaux. Guillaume lui est imperturbable. Il reste debout, sans bouger, sans manger, sans boire. Moi je commence à sérieusement fulminer et à chercher des yeux un pont d'où me jeter. Je ne supporte pas cette attente sans deadline. Je n'arrive plus à lire car mon cerveau se fouette sans cesse de ne pas avoir pris le bus de ce matin. Le prochain bus annoncé est vendredi, or samedi on doit être à El Calafate (en Argentine) pour retrouver notre amie, i.e. à 800 km de là. Je commence à craindre qu'aucune voiture ne s'arrête de la journée. Et je ne me vois pas du tout recommencer ce petit manège demain.

15h. Toujours rien. Quelques voitures sont passées. Dont les deux tiers avec de la place que je soupçonne d'aller à Chile Chico, car avec des têtes de touristes à bord. Mais bon, on ne peut pas reprocher à des gens ayant loué une voiture de ne pas prendre deux vagabonds à sac à dos. On aurait bien voulu louer une voiture, mais c'était vraiment trop hors budget pour des tour-du-mondistes.

15h30. J'enrage. Peut-on mourir d'ennui ??? Je fini par craquer et quitter mon poste pour aller au supermarché acheter de quoi manger et demander s'il n'y aurait pas par chance un autre bus. Et contre toute attente, il y en a bien un qui va passer à 16h30.

Toute guillerette, je retrouve donc Guillaume. En l'espace de 5 secondes mon esprit est passé de l'agacement à l’allégresse... Alors que pourtant dans le fond, il n'y a pas mort d'homme. Si ce voyage m'a permis d'apprendre à prendre plus de recul, j'ai par contre encore une marge de progression non négligeable....

16h30. Houpi, un mini-bus est en vue et il n'est pas plein. On embarque donc mais on paye le prix fort et 1000 pesos chacun de plus que le bus du matin (soit 1,3€). On a joué et on a perdu !

Seul point positif de la journée, on a parcouru les 100 km qui séparent Puerto Guadal à Chile Chico sous un ciel bleu magnifique et on a profité donc à fond de la magnifique vue sur la côte et le lac. C'est la seule image sous le soleil qu'on aura eu de la Patagonie et c'était splendide.


A Chile Chico nous trouvons à loger chez l'habitant, chez une petite mamie adorable qui nous a chouchouté. Ça nous a remonté le moral.

Demain on quitte le Chili direction l'Argentine. Fini la CarreteraAustral et ses routes fantômes. On retrouve la civilisation et arrête le stop. Il n'est plus question que je retente l'expérience. Même si les bus argentins sont réputés chers, je préfère payer que rester sur le bas-côté. Il nous reste deux jours et demi, et 700 km à parcourir pour retrouver à El Calafate notre amie (Jessica). C'est court mais ça passera ! Les routes vont être maintenant bien goudronnées et relativement droites.

Informations pratiques :
  • Le long de la Carretera Austral, il vaut mieux avoir prévu suffisamment de liquide, car il n'y a clairement pas des distributeurs dans chaque ville étape. Par contre, dans les villages il y a des petites supérettes et les prix n'y sont pas beaucoup plus cher que dans les grandes villes (à part légèrement pour les fruits et légumes). Pas la peine donc de se charger comme nous avec des produits de base (pâte, thon, gâteaux etc.).
  • Moyens de transport utilisé :
    • Ferry Quellón => Chaitén : 12 000 pesos par pers., soit 16€. Il n'y a qu'un ferry par semaine, le jeudi matin à 3h du matin (embarquement à 1h). Nous avons acheté nos billets à l'avance sur le site internet de la compagnie Naviera Austral.
      A Quellón, il y a une salle d'attente chauffée ouverte toute la nuit. On n'a donc pas attendu dans la rue !
    • Bus Chaitén => La Junta - Vendredi à 17h - Prix : 5 000 pesos par pers.
    • Bus La Junta => Puyuhuapi - Samedi à 5h du matin - Prix : 2 000 pesos par pers.
    • Bus Puyuhuapi => Coyhaique - Dimanche à 8h - Prix : 8 000 pesos par pers.
    • Bus Coyhaique => Puerto Tranquilo - Lundi à 9h - Prix : 9 000 pesos par pers.
    • Bus Puerto Tranquilo => croisement avec la route allant à Chile Chico - Mardi à 14h - Prix : 2 000 pesos par pers.
      NB : pour aller à Puerto Guadal de Puerto Tranquilo nous avons pris le bus allant à Cochrane. Nous avons demandé au chauffeur de nous arrêter au croisement avec la route allant à Chile Chico puis fait du stop sur 10 km pour rejoindre Puerto Guadal
    • Bus Puerto Guadal => Chile Chico - Mercredi à 16h30 - Prix 8 000 pesos par pers.
      Mais à 7h du matin, il y avait aussi un bus un peu moins cher (7 000 pesos par pers.)
  • Bon plan hôtel :
    • Chaitén : El Quijote20 000 pesos pour une chambre double sans petit-déjeuner, salle de bain commune. Wifi, mais pas de cuisine à dispo. Les proprios sont très sympas et pleins de conseils sur la région. Leur resto aussi est à tester : le poisson y est divin et en format XXL.
    • La Junta
      20 000 pesos pour une chambre double avec petit déjeuner, salle de bain commune. Wifi & cuisine à dispo.
      C'est le chauffeur du bus qui nous a donné l'adresse. Ce n'est pas un hôtel mais une chambre chez l'habitant. C'est dans la rue où le bus s'arrête, à 50 m. Une affiche indique qu'il y a des chambres à louer. 
    • Puyuhuapi : Hostal Don Luis
      24 000 pesos pour une chambre double avec petit déjeuner, salle de bain commune. Wifi & cuisine à dispo. 
    • Puerto Tranquilo : Hospedaje Silvana
      16 000 pesos pour une "cabaña" (cabane toute équipée : salle de bain, cuisine, wifi) partagée avec deux autres voyageurs. Mais l'hôtel propose aussi des chambres à 8 000 pesos par personne avec cuisine & wifi à dispo (prix basse saison). 
    • Puerto Guadal : Hospedaje La Lomita
      14 000 pesos pour une chambre double salle de bain commune, soit 19€. Wifi, eau chaude & cuisine à dispo.
      Un hôtel agréable et économique. Pas forcément facile à trouver car un peu éloigné du centre. Mais Puerto Guadal étant un village, on ne met pas beaucoup de temps pour y arriver.
    • Chile Chico : Cabana Don Marcelo (propose des chambres chez l'habitant)
      20 000 pesos pour une chambre double salle de bain commune, petit déjeuner inclus. Wifi. Cuisine à dispo. La proprio (une mamie) a été à nos petits soins. On s'est senti comme à la maison.

1 commentaire:

  1. Du coup, il faudra retourner en Patagonie pour vraiment en profiter ! Vos photos donnent envie de découvrir ce coin du monde... comme chacune de vos excursions d'ailleurs ;-)
    L'impatience montre le bout de son nez... sans doute aussi lié au retour qui approche.
    Profitez bien de votre dernier mois... enfin moins de 20 jours maintenant...
    Les lumières de Noël éclairent Paris... vous serez contents de revoir les Champs, vos amis... et la famille... agrandie en plus !!!

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